Amplifier la voix
des groupes marginalisés
avec la recherche
itinérante

Mafalda la Westfalia et Julie Richard souhaitent contribuer au changement social

Elles parcourent des milliers de kilomètres pour aller à la rencontre de jeunes faisant partie des groupes marginalisés. Elles souhaitent ainsi rendre audible une voix peu ou pas entendue afin de la considérer pour influencer les pratiques et politiques qui encadrent le développement des communautés. Grâce à une station de balado mobile, elles recueillent les récits de jeunes adultes qui racontent leur expérience de la ruralité et d’une diversité d’inégalités. Ces jeunes y expriment leurs révoltes, leurs colères, leur rapport au politique, leur vision de leur place dans la communauté et leurs objets d’espoir.

Mafalda, plus qu’une méthode de recherche itinérante, une personnalité qui prend parti pour les groupes marginalisés et qui souhaite contribuer à la production d’un savoir engagé.

Une méthode de recherche innovante

Mafalda la Westfalia devient un moyen pour rejoindre les jeunes qui sont plus difficiles à rejoindre avec des méthodes traditionnelles. Avec son allure colorée et son habitacle chaleureux, elle offre un climat propice pour libérer une parole peu entendue. Cet espace sécuritaire est reconnu comme une méthode de recherche itinérante, critique et novatrice.

Julie Richard a commencé sa pratique auprès des jeunes personnes marginalisées dans les quartiers centraux de la ville de Québec en 1999. Elle s’établit dans la région de Charlevoix en 2008. Entre 2009 et 2014, alors qu’elle était organisatrice communautaire et dédiée à la coordination d’un organisme, elle soutient, avec ce street minding qui la caractérise, un projet d’action sociale de proximité qui avait pour objectif de faciliter la rencontre avec les jeunes de la région dans un contexte plus informel. Alors équipée de matériel audio et vidéo et de matériel de prévention, Mafalda parcourait le territoire pour offrir un espace itinérant de rencontre, générer des projets avec les jeunes et les mettre en lien avec des services. Aux côtés de plusieurs partenaires communautaires, institutionnels et municipaux, Julie Richard portait le projet avec l’idée de créer des espaces d’échanges sécuritaires et ludiques dans l’espace public.

Au cœur de la recherche, entendre les jeunes

Inspirée par cette méthode d’intervention qui avait déjà fait ses preuves, Julie Richard l’a répliquée pour son projet doctoral qui porte sur les expériences participatives des jeunes personnes considérées marginalisées des milieux ruraux. Avec sa codirectrice de thèse Cécile Van de Velde, sociologue et professeure à l’Université de Montréal, Julie Richard s’est également servie de la méthode afin d’élaborer et de déployer un autre projet de recherche sur les émotions politiques.

Source : Radio-Canada / Andréanne Germain

Dans ce projet où Mafalda est aussi mobilisée, Julie Richard, Cécile Van de Velde ainsi que la professionnelle de recherche Krystal Tennessee s’intéressent particulièrement aux colères sociales comme émotion politique. Que vivent les jeunes qui subissent les inégalités et qui sont au passage vers l’âge adulte, une étape charnière du développement et de la prise de décisions? Leur enquête itinérante a permis de recueillir la parole de jeunes adultes qui ont entre 18 et 30 ans et qui sont en situation d’extrême pauvreté, d’itinérance et de dépendance.

Selon Julie Richard, la parole des jeunes adultes est souvent ignorée, surtout celle des groupes marginalisés.

« C’est pour amplifier ces voix-là parce qu’elles sont souvent disqualifiées. On les considère moins pour prendre les décisions politiques, par exemple […] nous ce qui nous intéresse c’est de faire en sorte que cette parole-là soit entendue. »
– Julie Richard, professeure en travail social à l’Université du Québec à Rimouski

Depuis le printemps 2020, la professeure Richard réalise des recherches sur le terrain en Gaspésie, en Mauricie, au Centre-du-Québec et dans la région de Sudbury en Ontario pour les deux projets. Elle prévoit également se rendre en Abitibi-Témiscamingue au printemps 2024. En combinant les deux projets, près de 70 entretiens ont été réalisés ce qui permet de mieux comprendre l’arrière-scène des inégalités sociales. Lors de ces entretiens, les jeunes ont fait le récit de leurs expériences dans un contexte sécuritaire. Cette recherche souhaite apporter une contribution théorique au concept de participation et soutiendra les travaux liés au développement d’une sociologie des émotions politiques et démocratiques. D’autres projets sont en cours d’idéation notamment avec le Collectif de recherche participative sur la pauvreté en milieu rural.

« Je fais le choix d’entendre les jeunes qui sont le plus exclus. Je m’intéresse à leur analyse sociale. On doit pouvoir les voir autrement que par leurs caractéristiques de désavantage ou comme une problématique.  »
– Julie Richard, professeure en travail social à l’Université du Québec à Rimouski

Le Collectif de recherche participative sur la pauvreté en milieu rural

Julie Richard est membre du Collectif de recherche participative sur la pauvreté en milieu rural. La mission du collectif est de coproduire des connaissances au carrefour des pratiques sociales, de la ruralité et de la pauvreté, en vue de contribuer au mieux-être des personnes et des collectivités rurales, particulièrement sur les territoires desservis par l’UQAR. Les méthodologies de recherche privilégiées par le collectif sont fondées sur la reconnaissance d’une triple expertise : celle des personnes vivant les situations sociales à l’étude, celle des praticiennes et des praticiens et des membres des municipalités qui accompagnent ces personnes, ainsi que celle des chercheuses et des chercheurs universitaires qui soutiennent les projets de recherche.

Équipe de recherche

En savoir plus sur : Julie Richard Julie Richard Professeure en travail social – UQAR Lévis